Il semble que Clinton inaugure un nouveau style dans les relations internationales: la candeur. Elle s'en explique en déclarant:
“Maybe this is unusual because you’re supposed to be so careful that you spend hours avoiding stating the obvious, but you know, that’s just not productive in my view,”
Traduction du blogo:"Peut-être que c'est inhabituel car on est censé être tellement prudent qu'il faut passer sont temps à éviter de dire ce qui est évident pour tout le monde mais ça n'est pas très productif selon moi."
Elle a appliqué cela à sa visite en Chine en enjoignant aux chinois de continuer à financer la dette américaine et en ajoutant: “we are truly going to rise or fall together.” Autrement dit: "si vous nous lâchez, vous êtes finis".
Pourquoi la Chine devrait-elle continuer à prêter à un emprunteur devenu soudainement massivement dispendieux avec un revenu en chute libre? Clinton ne le dit pas. Elle ne dit pas non plus s'il y aurait une limite raisonable à l'engagement financier chinois face à l'énormité des nouveaux besoins américains. La crise a vu beaucoup de déséquilibres qui devaient "durer toujours" revenir brutalement vers des normes historiques. Les Etats sont devenus le dernier refuge de la fiction selon laquelle des entités, quelque part, étaient solvables et paieraient pour les années d'abus qui ont vu quelques uns s'enrichir massivement à coups de produits financiers ultra toxiques qui ont finalement détruit le système financier international*. Clinton essaye pareillement de se persuader du fait que les chinois ont consenti une ligne de crédit infinie aux américains. Elle prend, autrement dit, ses désirs pour des réalités.
Les relations financières entre la Chine et les Etats-Unis sont un des éléments centraux de cette crise. J'ai toujours été étonné de constater qu'elles étaient souvent décrites comme un phénomène naturel à génération spontanée qui s'imposerait à nous (et de manière non-démocratique aux peuples chinois et américains) plutôt que comme le produit d'une vision politique et stratégique (ce qu'elles sont certainement). Quoi qu'il en soit, la crise fait entrer le pacte sino-américain dans une nouvelle phase durant laquelle "l'équilibre" supposément "mutuellement bénéfique" va être bousculé par des urgences domestiques de part et d'autre du Pacifique. Qui va sortir gagnant de ce changement? Il est à peu près sûr que les chinois vont perdre financièrement (soit défaut des Etats-Unis ou de Fannie/Freddie soit érosion des obligations américaines par l'inflation du dollar ou mélange des deux). La vraie question pour les chinois est: auront-ils réussi à modifier le rapport de force sino-américain** et à élargir leur sphère d'influence d'une manière qui puisse justifier le manque à gagner financier? A court terme, le plus probable est que Clinton ait raison et que les deux compères "s'effondrent ensemble".
* case in point: Avec les défauts en cascade que la crise va engendrer, qui va payer les trilliards rendus exigibles par les Credit Default Swaps vendus à la grande époque? Il paraît qu'une des raisons invoquées pour éviter un "évènement de défaut" des constructeurs automobiles américains est que $1,2 trillions seraient devenus exigibles par des gens ayant acheté de la protection. On peut d'ailleurs se demander pourquoi, après 18 mois de crise qui ont démontré par A+B l'extrême toxicité de ces produits, ils sont encore légaux et se traitent quotidiennement. L'idée que l'on peut assurer un risque sans poster aucun collatéral est une des grandes idioties (lucratives comme toutes les autres) de la finance récente. Les CDS ont donné aux défauts qui vont être entraînés par la crise (et qui étaient catastrophiques en eux-mêmes) une véritable dimension cataclysmique. Alors pour l'instant, les Etats essayent de nous faire croire le plus longtemps possible que ces défauts n'auront pas lieu. Le moindre mal sera sans doute de déclarer tous ces contrats viciés du jour au lendemain. Cela causera des dégâts majeurs mais probablement moins graves que si les montants supposément exigibles en cas défaut le devenait vraiment. C'est d'ailleurs en y réfléchissant ce qui se passe déjà: en faisant des contorsions pour empêcher les défauts, les Etats ne font pas autre chose que de rendre caduque ces contrats sans le dire. Le problème c'est qu'ils ne tiendront pas le coup et qu'il faudra un jour annuler purement et simpleme ces contrats.
Mais en tout cas, interdisons ce type de produits. Now!
** Il semble que Clinton ait usé de son nouveau style (la candeur) pour minimiser les problèmes de droits de l'homme en Chine sur le thème: "Je vais leur en parler mais je sais déjà ce qu'ils vont répondre donc passons à autre chose." Cela a consterné les activistes et les spécialistes de politique étrangère qui ont dit que Clinton n'avait rien obtenu en échange. Je crois qu'on ne sait pas si Clinton a obtenu des choses en échange. Je crois même qu'il s'agit peut-être d'un premier exemple de modification du rapport de force en faveur des chinois dont je parle plus haut. Les chinois continuent à payer mais ont peut-être obtenu que les américains leur parlent poliment sur les droits de l'homme. Ce qui bien le moins pour le pays qui nous a apporté Abu Ghraib et Guantanamo.
lundi 23 février 2009
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
1 commentaire:
Pourquoi la Chine devrait-elle continuer à prêter à un emprunteur devenu soudainement massivement dispendieux avec un revenu en chute libre? Peut-etre parce que les USA sont les premiers importateurs de produits fabriques en Chine? Donc tres important pour le commerce exterieur de la Chine
Enregistrer un commentaire