La statue de la liberté ferme au public pour quelque temps (j'ai d'abord pensé à une conséquence de l'attentat terroriste en Norvège mais il n'en est rien: l'île reste ouverte). Là-dessus les gens qui gèrent le site donnent des éléments de langage aux journalistes:
“It’s a restriction, not a closing,” he said. “We are concerned people will not hear the correct message, and they’ll focus on the word ‘close.’ The operative word to not use — please, please, please — is close. They’re going to restrict access to the statue’s pedestal and the interior. That’s the only change. Everything on Liberty Island outside of the statue is unaffected. There will be no scaffolding and very little interruption of activity.”
Le responsable d'un site touristique veut donc faire passer le bon message. Il a une demande raisonnable qui consiste à communiquer que "Liberty Island" va rester ouverte. Il demande en quelque sorte (maladroitement) l'aide des journalistes dans cet effort de "désinformation soft" (après tout si c'est une fermeture, c'est une fermeture...) qui vise à préserver l'afflux de touristes qui, dans leur grande majorité, ne montent pas dans la statue de toute façon. Le NYT cite alors ce plaidoyer un peu pathétique ("please, please, please") et humilie simultanément son auteur en titrant:
Statue of Liberty to Close for a Year
Alors que la demande de cet homme n'était pas exorbitante et probablement marginalement intéressée, ces deux journalistes (imbéciles) du New York Times décident de faire de lui un exemple d'intégrité journalistique. Ils ont dû se prendre pour Woodward and Bernstein en affirmant haut et fort que le NYT ne se laisserait pas manipuler par qui que ce soit (en l'occurrence par quelqu'un qui ne voulait sans doute que sauver quelques emplois).Loin de moi l'idée de reprocher à des journalistes d'être trop intègres (le problème se pose très peu). Par contre, essayer de se bâtir une réputation d'intégrité à peu de frais en réglant son compte à un lampiste alors qu'on est systématiquement obséquieux face aux vrais pouvoirs, ca c'est éminemment condamnable.
Pendant des années, le New York Times n'a pas utilisé le terme "torture" mais "enhanced interrogation technique" (l'un étant un crime de guerre et l'autre une création sémantique sans charge juridique) ce qui arrangeait bien évidemment l'administration Bush. Alors les journalistes de cette publication devraient faire preuve d'un peu plus d'humilité quand ils s'attaquent à un fonctionnaire qui leur demandent le même type d'arrangement sur un sujet beaucoup plus anodin. Ils devraient d'ailleurs faire preuve d'humilité en toute circonstance vu qu'ils travaillent pour l'un des vieux médias les plus corrompus de la planète (ça n'est pas peu dire).