mardi 23 juin 2009

Albanel out!

Victime de l'Hadopi. Frédéric Mitterrand in. Je trouve que c'est une bonne idée. Je veux bien l'ancien job de Frédéric Miterrand: directeur de la Villa Médicis à Rome...

La réforme de la finance US par Obama

Long story short: déception. Alors évidemment il y a des degrés dans la déception. Avec Summers et Geithner, que pouvait-on vraiment attendre? Obama avait signalé à maintes reprises qu'il était du côté des banques qui sont en retour de son côté: $40 millions de contribution de campagne pour Obama contre $34 millions à Bush en 2004 et surtout seulement $14 millions à John Kerry. Obama aurait pu faire le choix d'un financement essentiellement populaire grâce à ses contributeurs internets. Il ne l'a pas fait car cela aurait été une déclaration de guerre à tous les lobbys du pays qui auraient alors sans doute pu empêcher son élection ou rendre sa présidence impraticable. Or, Obama, comme nous le savons, n'est pas Spartacus: c'est un mandarin (si être éditeur de la Harvard Law Review quand on est étudiant ne vous donne pas ce statut aux Etats Unis, rien ne le fera). Il a donc mené sa campagne avec l'argent du "health care", des banques et autres industries "qui vous veulent du bien" alors qu'il avait l'opportunité pour la première fois dans l'histoire grâce à internet de bâtir sa présidence sur un soutien financier populaire qui aurait pu lui permettre de couper le cordon entre la présidence et les lobbies.

Donc cette réforme satisfait les banques. Il n'y a pas grand chose d'autre à ajouter. Quelques points ont suscité leurs "doutes ou interrogations" mais le blogo fait confiance à leurs armées de lobbyists pour aplanir les difficultés. Par exemple, l'idée qu'une agence s'occupe de protection du consommateur semble exorbitant à nombre d'institutions financières. Barney Frank et Chris Dodd (les récho et frigo des "banking comittee", le premier à la chambre des représentants et le second au sénat) semblent optimistes sur le fait que la majeure partie de cette loi devrait être adoptée sans difficulté. Après ce qui vient de se passer, on aurait plutôt imaginé des débats fracassants et une remise à plat totale du système mais non, c'est toujours l'ambiance "clubby" qui règne entre Wall Street et Washington.

La FED est portée aux nues, première responsable de la crise, elle hérite d'un certain nombre de prérogatives nouvelles comme celle d'analyser et de lutter contre les risques systémiques. C'est le nouveau pompier dont tout le monde sait qu'il est un dangereux pyromane. On le savait déjà mais tout le monde s'accorde sur le fait que casser le monolithe "Too Big Too Fail" ne peut-être une solution. Pour la bonne raison que tout le monde fait partie du monolithe. Krugman a même pris parti pour le monolithe (ticket d'entrée dans une prochaine administration?).

L'incapacité du système à se réformer face à une crise de cette ampleur est très inquiétante et montre son état de pourrissement avancé. Le monolithe avait précédemment recours aux méthodes les plus douteuses pour extraire de la population l'écot le plus important possible mais après le bailout, il a désormais le pouvoir de lever l'impôt et de puiser directement dans les finances publiques. Le "runaway train" continue donc inexorablement sa route. Personne n'essaye d'actionner les freins mais ils ne marchent sans doute plus de toute façon.

Après l'enrichissement des années fastes bâti sur le plus grand Ponzi Scheme de l'histoire (les capitaux du monde entier contribuaient à l'explosion des prix de l'immobilier orchestrée par la FED), on aurait pu penser que l'effondrement allait entraîner une remise à plat du système bancaire. Ca n'est pas encore le cas mais si on compare cette crise à celle de 29, nous ne sommes qu'en 1931. Cette capacité du système bancaire à préserver sa structure et son pouvoir jusqu'ici a en tout cas démontré le contrôle inouï qu'il a sur le système politique, et a fait de ce contrôle le premier suspect quand on essaye d'identifier les causes de la crise.

Money talks...

Un article du New Yorker (via TBP) retrace le parcours d'Angelo Mozilo, l'homme qui a dirigé Countrywide Financial Corp depuis 2000. Countrywide a été un des plus gros producteurs d'emprunts subprimes de la période.

In 2005, Fortune placed Countrywide on its list of “Most Admired Companies,” and Barron’s named Mozilo one of the thirty best C.E.O.s in the world. The following year, American Banker presented him with a lifetime-achievement award.
En 2005, Fortune a inclu Countrywide dans sa liste des sociétés les plus admirées. Le magazine Barron's a élu Mozilo un des 30 meilleurs dirigeants d'entreprise du monde. En 2006, le magazine American Banker lui a remis un prix d'honneur pour toute sa carrière.

Le Blogo déplore souvent les manquements des MSM (vieux médias) et leur incapacité à dénoncer les abus dans l'immobilier durant la dernière décennie. Comme le montre les différents honneurs qui ont été faits à Mozilo, cette critique ne rend pas justice à la complicité active de ces médias dans la frénésie immobilière qui a touché l'Amérique. Au moment où il reçoit ces honneurs, Countrywide est occuppée à corrompre toutes sortes de dignitaires américains avec des emprunts préférentiels dont les divers bénéficiaires (pas tous connus) allaient d'un sénateur (Chris Dodd - sénateur à la tête du "Banking, Housing and Urban Affairs comittee"* - ça ne s'invente pas) au président de Fannie Mae.

Surtout, Countrywide produit chaque année des millions d'emprunts dont le caractère radicalement abusif et financièrement suicidaire aurait sauté aux yeux de tout journaliste, régulateur ou homme politique qui s'y seraient arrêtés quelques minutes. Countrywide développe des call centers pour que le maximum de gens en croque. Des propriétaires ayant déjà remboursé leur logement rempilent avec un nouvel emprunt (c'est ainsi que des personnes âgées qui auraient dû être à l'abris se retrouvent aujourd'hui à la rue). Pendant ce temps-là les MSM, les régulateurs et les politiques (tous sous influence) n'ont pas cessé d'encourager ce mouvement destructeur.

Les plus consensuels ("on ne va pas se fâcher pour si peu...") y verront une hallucination collective et les plus belliqueux y verront le crime du siècle. La vérité est que c'est un mélange des deux. Un certain nombre d'idiots utiles n'ont fait qu'accompagner le mouvement mais énormément de responsables savaient que tout cela ne pouvait pas bien se terminer. Une bonne approximation est sans doute que la naïveté des acteurs était inversement proportionnelle au profit qu'ils tiraient de la situation. A noter que le profit n'a pas été que financier: cette injection de dopants dans l'économie a dégagé des marges de manoeuvre politiques importantes (tax cuts, guerres...)

*Chris Dodd est toujours à la tête de ce comité, on ne change pas une équipe qui gagne... La superstructure politico-financière n'a pas bougé d'un iota bien qu'elle soit responsable de la crise comme le déplore le blogo à longueur de posts. The future looks bright ahead!