Les banques sont en difficulté? Comptez sur le gratin des éditorialistes du Washington Post et du NYT pour voler à leur secours. Je ne crois pas que ces éditoriaux grotesques soient faits pour convaincre. Je pense que l'idée est plutôt que pendant que les gens lisent ça, au moins, ils ne lisent pas autre chose de plus subversif...
David Brooks nous explique que Simon Johnson (qui figure sur la blogo compliant list) se trompe.
L'imbécile* Richard Cohen nous explique que Larry Summers était bien payé l'année dernière ($7,2 millions) et que les américains, au lieu de l'accuser de conflits d'intérêts, devrait le remercier d'avoir rejoint le service public en acceptant une baisse de salaire. Il fallait oser.
Note: j'essaierai d'ajouter d'autres op-eds ridiculement "pro-banques" comme ceux-ci dans la soirée. J'en lis beaucoup en ce moment.
*après le speech de Powell aux Nations-Unies en 2003 qui n'avait absolument rien démontré quant aux armes de destruction massive irakiennes, Richard Cohen déclarait la chose suivante dans un op-ed du wapo: "The evidence he [Powell] presented to the United Nations—some of it circumstantial, some of it absolutely bone-chilling in its detail—had to prove to anyone that Iraq not only hasn’t accounted for its weapons of mass destruction but without a doubt still retains them. Only a fool—or possibly a Frenchman—could conclude otherwise."
mercredi 8 avril 2009
Le plan Geithner
La dernière version du plan Geithner repose sur un mensonge: il n'y aurait plus de marché pour un certain type d'obligations comme les Residential Morgage Backed Securities (obligations garanties par des emprunts hypothécaires résidentiels). C'est faux. Il existe un marché. Le problème est que les institutions financières refusent de faire des transactions aux niveaux de prix indiqués par le marché. Ainsi, j'ai entendu qu'en gros, Le RMBS AAA s'échangerait autour de 30 cents du dollar alors que les banques (et autres) en demandent 60 cents du dollar.
La différence pour les banques, c'est qu'à 30 cents du dollar, elles doivent redemander des aides à l'Etat avec un risque de retour de bâton politique qui pourrait mettre en danger leur management. Le problème pour les acheteurs potentiels, c'est qu'à 60 cents du dollar ils sont quasiment certains de perdre de l'argent.
L'idée de Geithner est donc de subventionner l'achat de ces obligations de telle sorte qu'un marché réapparaisse. Il ne s'agirait pas vraiment d'un marché mais plutôt d'une "one way street" ou seuls les acheteurs subventionnés achèteraient. Cela a le mérite de ressembler à un marché ce qui est une composante importante du plan média de cette opération: "Le free market, c'est tellement super bien que ça va même nous sortir de l'ornière de la crise et même qu'on est pas des communistes etc...".
Je dis "le plan média" car concrètement, la substance du plan Geithner est une subvention aux banques réalisée de telle sorte qu'elle ne remette pas politiquement en cause la structure du pouvoir financier aux Etats-Unis. C'est un plan des banques pour les banques dont le principe général avait été établi par Henry Paulson, CEO de Goldman Sachs de 1998 à 2006.
Un des mensonges qu'on essaye de faire avaler aux américains est que ce plan va rapporter de l'argent. Là, on est vraiment dans le boniment de foire. Beaucoup de gens pensait qu'à 95 cents du dollar ces obligations étaient une affaire, qu'à 80 cents ce n'était qu'un trou d'air qui se règlerait rapidement. Après tout, ces obligations n'étaient-elles pas adossées à de véritables maisons, construites en dur avec des vrais matériaux de construction? Les américains n'avaient-ils pas besoin de se loger quand même? And so the story went... Le problème est que le subprime n'est pas réparti uniformément sur le territoire américain. Il y a eu des complexes immobiliers entiers qui ont été construits pour alimenter la frénésie spéculative liée à ce type de financement. La fraude massive a conduit à des no man's land parsemés de maisons qui décrépissent. C'est comme ça qu'une maison avec de la plomberie, des vitres, des serrures peuvent avoir une valeur quasi nulle. Certaines d'entre elles n'ont d'ailleurs jamais été achetées pour être habitées mais simplement pour être revendues un peu plus tard.
Quatorze millions de maisons seraient vides aux Etats-Unis (une sur neuf). L'histoire est que même à 30 cents du dollar, on est sûr de rien. Tout le monde pousse pour qu'on trouve de la valeur à ces machins et ça n'est pas un bon contexte pour modélisez sereinement. De plus, on tente toujours de modéliser de l'immobilier alors qu'il faut désormais modéliser une bulle spéculative. Le sous-jacent et ses spécificités sont devenus secondaires. Le plan Geithner pousse à nouveau les modélisateurs à la surestimation de la valeur de ces obligations. C'est le même biais depuis le début du subprime: des PHDs de mathématiques et des stars de l'informatique en sont réduits à mettre du rouge à lèvre à un cochon. Et comme le remarquait Obama pendant sa campagne, le maquillage n'y fait rien: "It's still a pig".
Le plan Geithner est donc un artifice pour faire endosser les pertes aux contribuables américains sans que cela ne soit directement une recapitalisation. C'est un scandale sans nom.
Alors bien sûr, on peut faire l'inventaire des contributions des banques (et hedge funds etc...) aux campagnes politiques depuis dix ans (ou plus). On peut faire la liste des "whistle blowers" qui ont vu leurs avertissements ignorés ostensiblement par le régulateur. On peut aussi s'amuser à compter le nombre d'employés de Goldman Sachs qui sont venus éclairer de leurs lanternes le ministère des finances américain. On peut aussi observer les aller-retours entre Fannie/Freddie et le monde politique américain. Mais à l'heure de choisir un seul élément qui témoigne de la corruption des politiques par Wall Street dans la période récente, quel meilleur symbole que le plan (Paulson/) Geithner qui saigne à blanc les contribuables américains en échange d'absolument rien?
La différence pour les banques, c'est qu'à 30 cents du dollar, elles doivent redemander des aides à l'Etat avec un risque de retour de bâton politique qui pourrait mettre en danger leur management. Le problème pour les acheteurs potentiels, c'est qu'à 60 cents du dollar ils sont quasiment certains de perdre de l'argent.
L'idée de Geithner est donc de subventionner l'achat de ces obligations de telle sorte qu'un marché réapparaisse. Il ne s'agirait pas vraiment d'un marché mais plutôt d'une "one way street" ou seuls les acheteurs subventionnés achèteraient. Cela a le mérite de ressembler à un marché ce qui est une composante importante du plan média de cette opération: "Le free market, c'est tellement super bien que ça va même nous sortir de l'ornière de la crise et même qu'on est pas des communistes etc...".
Je dis "le plan média" car concrètement, la substance du plan Geithner est une subvention aux banques réalisée de telle sorte qu'elle ne remette pas politiquement en cause la structure du pouvoir financier aux Etats-Unis. C'est un plan des banques pour les banques dont le principe général avait été établi par Henry Paulson, CEO de Goldman Sachs de 1998 à 2006.
Un des mensonges qu'on essaye de faire avaler aux américains est que ce plan va rapporter de l'argent. Là, on est vraiment dans le boniment de foire. Beaucoup de gens pensait qu'à 95 cents du dollar ces obligations étaient une affaire, qu'à 80 cents ce n'était qu'un trou d'air qui se règlerait rapidement. Après tout, ces obligations n'étaient-elles pas adossées à de véritables maisons, construites en dur avec des vrais matériaux de construction? Les américains n'avaient-ils pas besoin de se loger quand même? And so the story went... Le problème est que le subprime n'est pas réparti uniformément sur le territoire américain. Il y a eu des complexes immobiliers entiers qui ont été construits pour alimenter la frénésie spéculative liée à ce type de financement. La fraude massive a conduit à des no man's land parsemés de maisons qui décrépissent. C'est comme ça qu'une maison avec de la plomberie, des vitres, des serrures peuvent avoir une valeur quasi nulle. Certaines d'entre elles n'ont d'ailleurs jamais été achetées pour être habitées mais simplement pour être revendues un peu plus tard.
Quatorze millions de maisons seraient vides aux Etats-Unis (une sur neuf). L'histoire est que même à 30 cents du dollar, on est sûr de rien. Tout le monde pousse pour qu'on trouve de la valeur à ces machins et ça n'est pas un bon contexte pour modélisez sereinement. De plus, on tente toujours de modéliser de l'immobilier alors qu'il faut désormais modéliser une bulle spéculative. Le sous-jacent et ses spécificités sont devenus secondaires. Le plan Geithner pousse à nouveau les modélisateurs à la surestimation de la valeur de ces obligations. C'est le même biais depuis le début du subprime: des PHDs de mathématiques et des stars de l'informatique en sont réduits à mettre du rouge à lèvre à un cochon. Et comme le remarquait Obama pendant sa campagne, le maquillage n'y fait rien: "It's still a pig".
Le plan Geithner est donc un artifice pour faire endosser les pertes aux contribuables américains sans que cela ne soit directement une recapitalisation. C'est un scandale sans nom.
Alors bien sûr, on peut faire l'inventaire des contributions des banques (et hedge funds etc...) aux campagnes politiques depuis dix ans (ou plus). On peut faire la liste des "whistle blowers" qui ont vu leurs avertissements ignorés ostensiblement par le régulateur. On peut aussi s'amuser à compter le nombre d'employés de Goldman Sachs qui sont venus éclairer de leurs lanternes le ministère des finances américain. On peut aussi observer les aller-retours entre Fannie/Freddie et le monde politique américain. Mais à l'heure de choisir un seul élément qui témoigne de la corruption des politiques par Wall Street dans la période récente, quel meilleur symbole que le plan (Paulson/) Geithner qui saigne à blanc les contribuables américains en échange d'absolument rien?
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